La Prophétie de Xianglia (troisième partie)

Bonsoir,


Merci !!!

Pour les Tueurs, je crois me rappeler l'avoir lu dans un des Tueur de ... (Gotrek & Félix) où le nain disait à Félix qu'une fois mort honorablement, il pourrait discuter avec Grungni pour laver son honneur. Bon après, c'est vrai, ils sont fous ^^


Haghar.

Bonjour,


Je ne retrouve pas où j'ai lu cette explication (je n'ai plus les Gotrek & Félix, honte sur moi...)... l'aurai-je rêvée? ^^

Les Nains de Warhammer ayant une psyché proche des Vikings de notre monde, j'imagine que la mort glorieuse ne peut être "validée" que par le père des dieux nains, le plus puissant des trois. Il ne s'agit pas pour le Tueur de pleurnicher auprès de sa divinité une excuse pour son péché, mais plus de mériter à nouveau une place parmi les membres du clan dans ce qui se trouve au-delà de la mort.

Au pire, disons que j'ai extrapolé. Mais comme je le disais, à mon sens, seul Grungni peut juger de l'honorabilité d'une mort. Ils deviennent fous par la force des choses (ou parce qu'ils se plantent des clous rouges dans le crâne comme Nosebitter), mais il s'agit quand même d'une caste avec un Serment, une Forteresse et un Roi. Ils leur faut donc un minimum de raison pour avoir organisé tout ceci

Si l'extrait expliquant ceci existe, j'en reparlerai ici.

Bonne lecture !


PS : Eminar, je t'en veux terriblement !!

Bonjour,


@Eminar : merci beaucoup ! Le total fait 245 pages, ce qui au final n'est pas énorme.

@Autnagrag : oui en effet ce serait logique, cependant Grungni est le père des Nains (c'est un peu Odin chez les Scandinave), du coup s'il devait y avoir pardon, un Tueur même divin pourrait-il supplanter la parole de son dieu. Je suis conscient que, en tant que fan des nains (et je te comprends !!!), cette question soit particulièrement importante. Je garde ce que j'ai écrit, mais je vais faire en sorte de retrouver ce que je pense avoir lu dans un des Gotrek&Félix (en les relisant ) et je te dirai.

A très vite avec un nouveau chapitre


PS : mon manuscrit a été refusé par Bragelonne... j'attends la suite


Haghar.

Bonjour les ami(e)s !!


Voici le chapitre 12 de cette histoire que j’ai trop longtemps laissé en friche… j’espère que cela vous plaira comme jadis.

Bonne lecture !


Haghar.




Chapitre 12

Johan dépassa la douleur de ses jambes et dos, et continua à gravir le flanc accidenté de la montagne. Son ombre glacée enserrait son âme comme une poigne de métal, la tordant, la brisant. Le sigmarite sentait ses pouvoirs amoindris, bannis par la puissance chaotique enfermée sous les tonnes de roche. Il savait que les yeux de Sigmar le voyaient, le couvaient de sa bienveillance mais sa foi semblait s’effondrer dans les ténèbres. Le jeune impérial leva les yeux sur la haute stature de Volgan, qui avalait la distance les séparant du sommet. Le norse semblait dans son élément, plus vif que jamais. Un peu comme si la révélation de son secret l’avait allégé, ses chaînes de honte brisées.
Le barbare s’élança vers un piton rocheux et, à la seule force de ses bras puissants, se hissa sur l’avancée rocheuse. Johan ravala un juron et essaya de trouver des prises, incapable qu’il était de suivre le guerrier. Derrière lui, l’elfe fermait la marche. Le visage fermé, plus que de coutume, le rôdeur ne digérait pas la fuite du répurgateur pendant sa garde. Tal’var ne s’était pas appesanti sur les circonstances de son évasion. Stark n’avait pas reparu alors que les compagnons finissaient de traverser la forêt de Norsca et s’engageaient sur le mont maudit.
Le jeune prêtre se doutait que l’elfe avait libéré le répurgateur. Mais leur quête était plus urgente que de longues et stériles explications, d’autant plus que Stark ne serait pas le seul à les poursuivre. Bien que n’ayant affronté que les bêtes mutantes, mi-loup, mi-serpent, Johan savait que leurs maîtres continueraient à les suivre.

- Volgan ! souffla-t-il, je ne peux te suivre.
- Je vais t’aider, répondit le barbare en se baissant, bras tendu. Attrape !

Johan saisit l’énorme main du norse et ce dernier tira à lui arracher le bras. Mais la roche était trop glissante et le sigmarite chuta lourdement sur le sol rocailleux, une pluie de gravats s’abattant sur l’elfe qui esquiva. Volgan observa rapidement la paroi mais il savait qu’elle ne présenterait pas de réelles prises.

- Faites le tour, dit-il, on se retrouve plus tard…
- Évitons de nous séparer, siffla l’elfe.

Si la remarque se voulait être de bon sens, Johan lut dans le sombre regard du rôdeur qu’il n’en était rien. L’elfe ne voulait pas laisser seul le barbare. Volgan toisa son compagnon avant de hausser les épaules et de les rejoindre d’un bond gracieux. Tal’var allait ajouter quelque chose quand il tiqua. Se retournant vivement, il darda ses yeux sur la pente.

- Tes poursuivants nous ont retrouvé, souffla le rôdeur à l’attention de Johan. De bons pisteurs…
- Affrontons-les, gronda le barbare en saisissant son arme. Cela fera une épine de moins.
- Non… le terrain n’est pas pour nous avantager. Et Johan ne semble pas au meilleur de sa forme.
- La montagne… aspire ma volonté, murmura le sigmarite en se signant. Mais il me reste mon marteau.

L’elfe regarda autour de lui. La pente était beaucoup trop plate pour se dissimuler, et trop accidenté pour combattre efficacement. Quelques broussailles parsemaient la roche écorchée, noire et grise. Aucun animal, ni sur la pierre, ni dans le ciel. En-dessous de lui, l’elfe observa l’immense étendue de sapins et de pins, vert sombre. Leurs poursuivants avaient réussis à retrouver leurs traces bien qu’il est tout fait pour les dissimuler. Il n’avait aperçu que des ombres, mais plus nombreuses qu’eux.
Tal’var se retourna vers le pic enneigé. Le soleil, bien qu’au plus haut dans le ciel du Nord, ne semblait pas capable d’illuminer les flancs de la montagne. Pourtant, un rayon chaud perça l’ombre, se reflétant sur une structure de métal noir. Une porte.

- Là ! dit-il en pointant du doigt l’issue.

Johan imita le norse mais ses yeux d’humains ne perçurent pas ce qu’avaient vu les yeux sensibles de l’elfe. Comme un seul homme, les trois compagnons reprirent leur escalade, en faisant un détour qui risquait fort de les ralentir.

Tzorg avançait en premier, les muscles bandés sous la fourrure orangée, retenant avec peine ses bêtes rendues folles par l’odeur des humains et de l’elfe. Suivait Sven, arc en main et flèche encochée. Plus loin continuaient le reste des chasseurs de Mar’gor et une dizaine de pillards rencontrés la veille.

- On va d’voir partager la prime avec ces crétins, gronda le gor en lorgnant les maraudeurs avancer dans un vacarme de jurons, bruits de métal et de roche. Déjà qu’on a perdu plein d’bêtes…
- Ne t’inquiètes pas, souffla Sven en léchant ses lèvres gercées par le froid. Mar’gor compte pas les garder.

Le gor dévoila ses crocs dans un sourire de cauchemar avant de tirer d’un coup sec sur ses chaînes. Un loup-serpent jappa en chutant tandis que l’autre dévoilait ses crocs suintant de venin. Le gor éructa un ordre dans sa langue bestiale et les mutants reniflèrent le sol de leur truffe et l’air de leur langue bifide. Le monstre n’était jusque là pas sûr que ses proies visaient le sommet. Peut-être voulaient-ils les perdre dans la montagne pour en faire le tour. Mais ses bêtes lui démontrèrent le contraire.

- Y’vont vers les neiges, cracha le gor en reprenant la marche.
- Vers le tombeau ? Pourquoi ? demanda Œil-de-Sang.
- M’en fout. Vais massacrer ces sales bâtards qu’ont crevé mes bêtes !
- Ca me va… mais laisse-moi l’elfe !

Johan maudit les puissances de la ruine lorsque, l’ombre grandissante sous la naissance de la nuit, une pluie glacée parsemée de grêlons s’abattit sur eux. La roche déjà difficile devint glissante et l’humain chuta une bonne demi-douzaine de fois, s’écorchant sur les arrêtes coupantes de la pierre noire. La fatigue et les blessures, le froid et la pluie qui alourdit rapidement sa robe de bure menacèrent de le faire hurler. L’elfe continuait avec une cadence abominable, disparaissant derrières des rocs immenses, derrière le rideau gris de pluie. Même Volgan ralentit. Johan jeta un regard sombre à l’elfe dont le visage était masqué par l’ombre de sa capuche.
Mais le jeune prêtre était pragmatique, et il dû s’avouer que le rôdeur avait raison. Il leur fallait rejoindre au plus vite cette maudite porte. Ils seraient dès lors au sec, à plat et proche de leur but. Combattre leurs poursuivants aurait été un suicide, d’autant plus depuis l’averse.
Un éclair blanc déchira les ténèbres et se refléta sur l’immense porte qui se situait à quelques pieds devant lui. Un second révéla le visage démoniaque d’airain qu’était la porte, plus grande que celles des cités de l’Empire, engoncée dans la roche noire, elle semblait darder ses méchants yeux sur les compagnons. Des centaines de dents aussi grandes que des épées suintaient de boue, charriée par la pluie tombante. Une odeur malsaine s’en échappait et Johan s’apprêtait à voir la gueule se refermer sur eux. Pourtant, Tal’var passa sous l’arche sans autre changement qu’il se retrouva au sec. Volgan suivit, lorgnant avec mépris la sculpture hideuse. Murmurant une courte prière, le sigmarite suivit.
Derrière la bouche d’airain se dessinait un couloir taillé, ancien. Les murs avaient connu peintures et bas-reliefs mais le temps, l’usure et l’érosion en avait effacé la quasi-totalité. Les dalles du sol étaient ébréchées, voire manquante. Des torchères en acier retenaient des vestiges de torches éteintes. L’elfe en saisit une qui s’effrita entre ses longs doigts fins.
Johan s’apprêtait à invoquer la lumière de son dieu quand il se rappela que ses pouvoirs étaient annulés ici. Maugréant, il chercha une torche ayant résisté au temps, en vain. Dans un crépitement, Volgan brandit une torche manufacturée, et la flamme d’abord timide gonfla et vrombit, apportant lumière et chaleur inespérée dans ce lieux de froides ténèbres.

- Je les ai piqué à Stark, gronda le barbare devant les regards interrogateurs de ses compagnons.
- Bonne chose… murmura l’elfe.

Tal’var se pencha au-dehors, scrutant la tempête qui battait les flancs de la montagne. La nuit avalait la forêt et le ciel et seul la pluie de grêlons était visible. Et c’est à cette tempête qu’il dut son salut. La flèche à tête d’acier et à empennage rouge jaillit de l’ombre, sifflante. Sans le vent, elle l’aurait cueillit à la gorge. Un archer aussi bon que lui – meilleur peut-être – faisait partie des chasseurs. L’elfe ramassa la flèche et se retint à temps de la tirer dans la tempête ; inutile de la gâcher.

- Dépêchons-nous…

- Mais qu’est-ce qu’tu fais ? hurla le gor pour couvrir le rugissement du vent.
- J’avais ce bâtard d’elfe dans ma ligne de mire, siffla Sven. Y avait de la lumière qui m’en faisait une belle cible… foutue tempête !
- Ils sont entrés, déclara Mar’gor, et il n’y a pas d’autres issues.
- Attendons ici, en embuscade, proposa Karl qui avait clairement de plus en plus de mal à combattre les ardeurs du vent. Les hommes ne veulent pas suivre de toute façon.

Mar’gor se retourna lentement vers son lieutenant. L’orage illuminant les cieux et la montagne accentuait l’horreur des visages démoniaques couvrant l’armure ouvragée, mais c’est le regard du norse qui terrifiait ses séides. Il s’avança d’un pas lourd, délibérément lent. Son poing fut fulgurant cependant, et s’écrasa sur le torse dénudé du nordique qui chancela vers l’arrière. La poigne d’acier runique enserra le cou musclé du barbare et le souleva au-dessus du sol. Derrière, et ce malgré la pluie d’eau et de glace mêlée, les maraudeurs regardèrent Karl porté à bout de bras par le terrifiant chasseur en armure.

- Attendre… ? gronda Mar’gor. Attendre pour quoi ? Pour les cueillir comme des lapins. Où se trouve le plaisir de la chasse ? Aurais-tu peur, Karl ?!
- Non… non mon seigneur, parvint-il à articuler, non sans difficulté. Mais les hommes craignent ce qui dort derrière la porte d’airain…

Le chasseur laissa choir son lieutenant qui s’effondra comme une poupée de chiffon, haletant sous la pluie glacée qui griffait son torse et ses bras. Il descendit sur quelques pas et d’un coup violent, asséna un coup de poing ganté de métal sur le visage de celui qui dirigeait les maraudeurs. L’os du nez se brisa dans une gerbe de sang que la pluie transforma en torrent écarlate. Sa botte écrasa le pied du barbare qui hurla sous la soudaine douleur. La main gantée empoissée de sang s’engouffra dans la bouche ouverte et saisit la mâchoire inférieure. D’un grognement de rage contenue, Mar’gor arracha la mâchoire, déchirant tendons et chairs, os et muscles. Le maraudeur s’écrasa au sol où son sang se mêla à la boue et donna un reflet rougeâtre à la pierre noire.
Les norses regardèrent avec horreur le corps mutilé de leur chef dévoré par les deux bêtes de Tzorg. L’homme-bête riait à gorge déployée, les grêlons éclatant sur ses formidables cornes. Sa fourrure détrempée se parait de cristaux de glace, brillant sous la lumière des éclairs. Sven souriait, affichant clairement son intention d’abattre le premier de ces hommes qui voudrait se rebeller.
Karl se releva, chancelant encore sous la violence des coups de son maître. Il avait fait une erreur. C’est à lui qu’il échouait de faire un exemple. Mar’gor, par son pesant silence, lui laissait de toutes évidences une nouvelle chance, qu’il saisit, hurlant plus fort que la tempête.

- Vous êtes sous nos ordres, maraudeurs ! Une chasse attend votre courage et les dieux nous regardent… en avant !!

Le norse s’élança sur la pente glissante, de grandes enjambées qui le menèrent rapidement sur le promontoire où veillait la porte d’airain. Les maraudeurs suivirent, enhardis par le désir de survie. Mar’gor s’autorisa un sourire tout en flattant les flancs des loups-serpents.

Aurélia se pencha sur le bastingage du navire tiléen. Les marchands – des pirates de toute évidence – leur avait proposé à Miguel et elle de les mener jusqu’au Pays Perdu ou l’Empire. Rencontrés lors de l’attaque des mouches mutantes, leur capitaine s’était proposé de payer sa dette de vie en les menant à bon port, fermant les yeux sur la richesse que lui vaudrait la vente de deux nobles estaliens. Un pirate suivant un code. Une aide inespérée sur les terres maudites de Norsca. Miguel ne s’y était pas opposé ; le diestro était plus taciturne que de coutume. Deux semaines qu’Hannah avait expiré, libérant des monstres mutants qui avaient fauché des dizaines de vie avant d’être abattus. La science des armes et de la magie des estaliens avait grandement aidé. Personne ne savait qu’ils étaient – d’une certaine façon – responsables de l’attaque. Et, bien entendu, les de Llopa avaient eu l’intelligence de taire ce fait.
Le vaisseau pirate était bâti pour la vitesse. Long et effilé, il brisait les vagues bleu ardoise de la Mer des Griffes. Ses voiles blanches gonflées par le vent du Nord, le navire tiléen fonçait vers le Sud. Derrière elle, Aurélia observait les rivages de Norsca s’éloigner. Pas encore assez à son goût, car elle apercevait encore les gris de la plage, le brun de la terre et le vert des arbres. Au loin, au-dessus de montagnes, avançait un orage gigantesque. La jeune femme pria pour que la tourmente ne les rattrape pas sur l’océan déjà agité.
Un pirate borgne, trempée d’eau de mer, et mal rasé la frôla en passant. Un sourire édenté accueilli le regard froid de la jeune femme, sourire qui fondit rapidement quand des étincelles verdâtres crépitèrent au bout de sa main droite. Le tiléen rejoignit ses compagnons, hilares. Levant les yeux, elle croisa ceux du capitaine qui d’un regard, lui assura que nul ne la toucherait plus. Le bosco, un homme énorme et couvert de tatouages, descendit du château arrière pour asséner deux grandes claques au borgne. Le fouet claqua et le pirate en fut quitte pour une zébrure écarlate sur le torse. Aurélia esquissa un sourire au capitaine qui, bien que tournant son regard vers la mer, sourit également. L’estalienne n’appréciait pas spécialement le châtiment, mais si Miguel avait été dans les parages, le pirate aurait dû saisir son coutelas pour protéger sa vie… en vain.

- Voile ! hurla la vigie.

Bien que ne parlant pas le tiléen, Aurélia se doutait que la vigie avait vu quelque chose et suivit son bras tendu. Elle aperçu des formes flotter sur les vagues creusant la Mer des Griffes. Elle chanta quelques syllabes magiques et frappa dans ses mains. Une bulle pareil à celle que forme le savon dans l’eau chaude enfla entre ses mains tendues avant de s’aplatir en une lentille géante. Plus efficace que la longue-vue dégainée par le capitaine pirate, la magicienne observa au travers du disque transparent la scène grossie. Un navire plus fin, noir, fendait les flots dans leur direction. Les voiles noires et vertes arboraient des symboles elfiques.

- Druchiis !! hurla le capitaine, aux armes !!

Les compagnons traversèrent des salles vides, poussiéreuses. La torche que portait Volgan jetaient des ombres mouvantes tout autour d’eux. L’elfe évoluait hors du cercle lumineux, usant de sa vision bien supérieure. Des squelettes reposaient au sol, des armes rouillées engoncées entre leurs côtes ou dans leurs mains, figées par la mort. Des symboles impies avaient été gravés sur les murs, sols et plafonds. Des boyaux naturels se perdaient dans les ténèbres. Quelques volées de marche permirent aux compagnons de savoir qu’ils montaient dans les entrailles de la montagne. Chaque son était amplifié.
L’elfe leva la main à une intersection. Une vingtaine de marches ébréchées s’élançaient vers une nouvelle salle, plus grande, mais un boyau naturel débouchait lui aussi sur les marches. Et dans la poussière de roche, des pas mouillés se dessinaient nettement. Tal’var fit signe de faire silence à ses compagnons et s’approcha des traces. Deux hommes, dont un grand et certainement en armure. Les traînées légères d’humidité lui apprirent que l’autre devait être une femme en jupe ou en toge. Un elfe peut-être.
Alors qu’il se relevait, arc en main, une voix déchira le silence, plus haut. Son regard croisa celui de Volgan, qui détachait sa hache de son dos et celui de Johan qui, comme lui, avait reconnu des incantations. Armes au poing, les compagnons s’engagèrent rapidement sur l’escalier de roche décoré de runes maléfiques. Un hurlement de loup les suivit… les chasseurs les avaient retrouvés.

Le navire tiléen vira de bord, se mettant hors de distance des balistes à répétition elfes noires. Le vaisseau ennemi ne fit pourtant pas mine de les attaquer. Etonné, le capitaine pirate ignora les hourras de ses hommes devant la « fuite » des druchiis, cherchant où se situait le piège.

- Dame de Llopa, que voyez-vous avec votre sortilège ? demanda-t-il.

Aurélia se concentra et poussa les capacités de son sort au maximum, le navire elfe noir se dressa devant elle, semblant voler au-dessus de la Mer des Griffes. Elle vit tout d’abord des elfes, grands et élancés comme Tal’var mais à la peau plus pâle encore, les yeux sombres et le cheveu noir, l’air mauvais et cruel. Vêtus de vert sombre et de noir, protégés d’armures finement ouvragés et drapés dans des capes d’écailles vert-bleu, celles de dragons marins, les corsaires druchiis dardaient des regards affamés sur le navire tiléen. Pourtant leurs armes demeuraient au fourreau et même les terribles balistes n’étaient pas tournées vers les pirates.
Aurélia hoqueta en voyant des hommes-bêtes et des norses sur le pont inférieur. Eux aussi brûlaient de passer à l’abordage, mais conservaient leurs armes rangées. Armés, donc libres. L’estalienne ne connaissait que peu de choses sur les druchiis, un peu plus depuis que Tal’var leur avait compté certaines histoires et légendes. S’allier avec les serviteurs du Chaos leur était certes possible, mais quelle malchance de tomber sur cette rareté !
Du coin de l’œil, elle aperçut le capitaine et Miguel, tiré de son isolement par le branle-bas de combat, se placer derrière elle. Elle continua à déplacer son disque ensorcelé, s’arrêtant devant un norse vêtu d’une cotte de cuir bouilli. Sur son torse brillait le blanc d’un œil peint grossièrement.

- Nos ennemis… souffla le jeune femme en estalien.

Les elfes noirs se tournèrent vers une silhouette qui se plaçait sur le gaillard avant. La haute stature du seigneur druchii respirait la noblesse, la cruauté et le pouvoir. Son armure noire brillait comme la plus pure des obsidiennes. Une cape verte flottait derrière lui. Epée et dague reposaient au fourreau d’écailles et les bijoux d’or, d’argent et d’émeraude étincelaient. Une aura noire apportait le givre sur le bois traité du navire druchii. Ses yeux n’étaient que deux puits noirs sans fond, une brume sombre s’en échappant sous le vent. Malgré la distance réelle, il sembla voir les trois intrus et leur offrit un sourire des plus sadiques. Le capitaine sursauta face à ce sourire. Miguel et Aurélia, eux, tremblaient de fureur contenue.

- Dhuul… cracha le diestro.

Bonsoir les ami(e)s !!


Voici le chapitre 13.

Bonne lecture !


Haghar.



Chapitre 13

Le démon d’ombre et de gel déforma le gracieux visage de son nouvel hôte en affichant un sourire des plus carnassiers. L’esprit du druchii bataillait en vain pour reprendre le corps qui avait été le sien les deux derniers siècles – un instant éphémère pour l’entité de l’Aethyr – mais les enchantements préparés par le paria, l’elfe noir sorcier, le cantonnait à se perdre indéfiniment dans un labyrinthe mental ; Dhuul pouvait ainsi s’occuper pleinement de ses affaires. Sans cela, il aurait dû utiliser une certaine part de ses capacités pour maintenir l’esprit acéré et puissant du noble de Naggaroth.
Le navire tiléen s’efforçait de mettre les distances. Le vaisseau elfique aurait pu le rattraper en quelques instants et l’abattre, l’envoyer par le fond en une volée de tirs et de magie. Mais Dhuul n’avait plus de temps à perdre. Fort d’un nouveau corps et d’un équipage efficace, il allait rallier Norsca en vitesse et prendre en chasse Obéron. Certes, les estaliens étaient des Elus, les ennemis de son maître, mais ces deux là fuyaient les rivages du Nord.

- Orogas, siffla le démon sans quitter des yeux les tiléens, envoie ton dragon des mers s’occuper de ce navire. Qu’il se gorge de leurs vies à tous…

Le paria hocha la tête puis quitta le château arrière, psalmodiant déjà. Les druchiis et les hommes-bêtes regardèrent encore un instant leur capitaine nonchalamment accoudé au bastingage supérieur. Certains serraient les dents ou frappaient le pont de leur sabot, de fureur contenue, car le combat leur échappait. Dhuul sourit à nouveau, savourant leur haine et rage. Du combat, ils en avaient eu et, bientôt, ils en auraient de nouveau.
Alors que ses yeux elfiques observaient l’ombre aux reflets émeraude s’enfoncer dans les flots pour suivre le navire pirate, il se souvint de la prise du navire druchii, moins pour lui-même que pour torturer l’esprit d’Ilkhar de Malcœur.

Les hurlements résonnaient sur la Mer des Griffes. Humains et elfes noirs ferraillaient, les druchiis prenant l’avantage malgré la charge inconsciente du chevalier sur le pont de leur embarcation. Deux passes d’armes avaient suffit à Iriana pour mettre le bretonnien au sol. Deux marins gisaient aux pieds de la terrible elfe noire, diversion qui permit au chevalier de Pourpressence de se relever, en garde. Un sourire dédaigneux aux lèvres, l’elfe dansa autour de l’humain, frappant de ses fines lames sans pour autant passer le lourd harnois de métal. L’espadon frappa, brisant le bois du point sans toucher la véloce pirate.
Nicolas observait le noble aux prises avec le chef adverse. Un corsaire jaillit sur sa droite et il réussit de justesse à esquiver l’épée dentelée qui se ficha dans le bastingage. Le sabre du capitaine frappa la nuque de l’elfe qui s’effondra. Un frisson glacé lui parcouru l’échine quand, relevant les yeux, il aperçut l’ombre du troisième navire. Sur son pont s’agitaient des hommes-bêtes beuglants de haine, frappant leurs armes rouillées sur des boucliers de bois peints.

- Chevalier ! Fuyons !!

Le noble de Bretonnie ne sembla pas l’entendre, profitant de la surprise d’Iriana pour la frapper de son arme. L’acier issu des montagnes de Parravon brisa les côtes de la corsaire. Ses yeux violets arrondis de stupeur, elle lâcha un petit rire d’incrédulité. Puis d’un revers, l’arme gigantesque arracha chair et sang avant de l’abattre dans un bruit mouillé d’os brisé. Le second abordage débuta alors qu’Ilkhar sortait de sa cabine, vêtu de son armure et armé d’une épée luisante. Ses yeux émeraude se posèrent sur le corps mutilé d’Iriana, puis sur le chevalier à l’espadon ensanglanté. Les elfes bataillaient désormais sur deux fronts. Le premier, qui reculait doucement, ne tenait que par la présence du chevalier ; le second, mené par un humain gras et pourtant véloce, se composait d’hommes-bêtes enragés.

- Où est cette maudite sorcière ? gronda l’elfe. Orogas !
- Je suis là seigneur, siffla le mage renégat. Nous devrions nous rendre…
- Pardon ! éclata, outré, le druchii en se retournant, nulle reddition ! Tue ces sauvages !

Orogas dissimula un sourire avant de tendre le bras vers le noble. La sorcière absente rougissait l’eau de la Mer des Griffes, dévorée par le dragon des mers qu’il contrôlait. Sa main crépitant d’éclairs mauves se posa sur l’armure ouvragée d’Ilkhar de Malcœur. Ce dernier le regarda, incrédule, prêt à lui transpercer la gorge pour cet outrage. Mais la sombre sorcellerie œuvrait déjà. Il sentit le sang dans ses veines ralentir, ses muscles se crisper. Il ordonna à ses membres d’agir, mais ni ses jambes, ni ses bras ne bougèrent. Le sang finit par se figer. Même les larmes pointant dans ses yeux brillants refusèrent de couler sur ses joues blanches.
Profitant de l’arrivée des monstres du Chaos, les marins rejoignirent le Cygne d’Azur, tirant le chevalier qui refusait obstinément de battre en retraite, menaçant les hommes d’une fin atroce sous le regard de la Dame. D’un coup rageur, il se dégagea de l’étreinte d’un marin qui sauta sur le pont humain. Le chevalier de Pourpressence ouvrit la bouche dans un non silencieux quand un gor gigantesque trancha sur une bonne moitié l’échine de son destrier. Le noble animal hennit de douleur avant de s’effondrer sur le pont du navire druchii. La hallebarde rouillée continua sa besogne.

- Pour la Dame !! rugit-il en chargeant un elfe.

La suite s’était passée comme dans un rêve éloigné, le démon devant enfermer l’esprit du druchii dans le dédale forgé par Orogas. Les humains s’étaient finalement repliés, charriant le corps ensanglanté de leur héros. Les elfes noirs ne faisant pas partie de la secte menée par le paria empêchèrent les hommes-bêtes d’atteindre, massacrer et piller les fils de Bretonnie. La voile humaine brûlait cependant, autant dire que leur mort était signée.
Dhuul fit signe aux marins qui reprirent leurs postes tandis que les gors hurlaient des insultes aux tiléens qui filaient vers le sud.

- J’arrive Oberon… j’arrive.

Les hurlements sifflant des loups-serpents se répercutaient dans les couloirs et boyaux de la montagne, tant et si bien qu’il fut impossible aux compagnons – même pour l’elfe à l’ouïe hypersensible – de savoir combien de monstres allaient débouler par l’escalier tortueux. Tal’var encocha une flèche et se tourna vers Johan.

- Montez, occupez-vous du sorcier. Je m’occupe de nos poursuivants.
- On ne se sépare pas, répondit Johan marteau en mains, tu l’as dit toi-même.
- Je sais, mais ici je suis en position de force. Je me cacherai là, continua-t-il en montrant une statue adossée à la paroi. Je suis bon archer.

L’initié réfléchit un instant puis finit par hocher la tête en posant une main sur l’épaule du rôdeur. Un simple regard suffit. L’impérial se retourna vers Volgan qui gravit quatre à quatre les marches ébréchées de l’escalier. Johan suivit à son rythme, gêné par ses toges encore pleine de l’eau de pluie.
Les bruits de pas et les incantations s’estompèrent dans l’esprit de l’elfe. Tal’var s’agenouilla sur le piédestal de la statue, immense. Son corps était humanoïde, mais sa tête était celle d’un démon cornu, la langue tirée. Le temps l’avait démuni de son arme qui gisait en débris sur le sol et les marches. Dissimulé par l’une des grosses chevilles, l’archer pointa son arme vers les marches. Que leurs ennemis viennent des boyaux naturels ou du chemin qu’ils avaient lui-même et ses compagnons emprunté, il pourrait aisément abattre les premiers. En espérant qu’il n’y ai pas trop de ces monstres. Il se rappela les patrouilles qu’il effectuait depuis des années – comme lorsqu’il avait fait la rencontre avec le jeune Johan – à la défense de la forêt et des asrais ; ses frères et sœurs. Les gors et ungors tombaient invariablement dans leurs pièges et guet apens, et cela malgré une affinité naturelle avec les sous-bois. Orcs et autres gobelins, plus bruyants et sans connaissance forestière, mourraient plus vite encore. Certes les arbres avaient ici laissés leur place à des parois et à un ciel de roche, mais l’idée demeurait la même.
La torche de Volgan cessa d’illuminer l’endroit. Le noir rassura quelque peu l’elfe. Les sons d’une course effrénée dans l’escalier se substituèrent aux échos de paroles magiques. Une course faîte à quatre pattes, griffues. L’endroit s’illumina alors qu’Hurlevent se parait de lueurs blanches.

- Et merde… jura l’elfe.

Mais la soudaine illumination était superflue pour les sens surdéveloppés des loups-serpents. Le premier monstre mutant déboula dans le champ de vision de l’elfe. Ses crocs laissèrent passer trois fois sa langue bifide qui détecta l’elfe avant que ses yeux n’aperçoivent l’épée magique.
Tal’var ajusta son tir sur le blasphème vivant qui avalait la distance les séparant, gueule grande ouverte sur des rangées de crocs jaunes et suintants de venin. Déjà un deuxième monstre au cou ferré d’un collier en pointe d’acier noir apparaissait. La flèche se ficha dans le palais du premier loup-serpent, l’abattant sur le champ. La seconde flèche glissa sur les écailles du deuxième monstre. Trop tard pour l’archerie. La bête, rapide, se jeta sur Tal’var qui d’une pirouette passa derrière les jambes de la statue. Il en jaillit de l’autre côté, Hurlevent en main. De sa main libre il se tint à la jambe de pierre et s’élança au-dessus du vide. La lame frappa et brisa écailles et os, brûla fourrure et chair. Des flammes blanches embrasèrent le loup qui hurla en s’écrasant sur les marches en contrebas. La bête voulut malgré tout se relever mais déjà les muscles fondaient et les os cassés l’immobilisèrent.
Un bêlement de rage arracha l’elfe à son macabre spectacle. Un gor de belle taille, la fourrure orange, vêtu d’un pagne de cuir et de chaînes d’acier noir, se tenait sur une marche. Armé d’un fouet et d’une torche, il jeta un regard assassin au rôdeur qui encocha de nouveau. Une flèche siffla, à l’empennage rouge. Tal’var ne l’esquiva que par chance et se dissimula à nouveau derrière la statue, libérant sa flèche qui s’écrasa sur la marche devant le gor.

- Tzork, gronda une voix, mets-toi à couvert ! Et l’elfe est à moi !!

Tal’var tiqua. L’archer qui par deux fois avait faillit l’abattre dans des conditions peu évidente n’était pas un elfe comme il le croyait mais un humain !

- Un duel d’archer ? demanda le rôdeur. Cela risque d’être long.
- Ne crois pas cela bâtard, cracha Œil-de-Sang, une flèche me suffira.
- Deux n’ont pas suffit… fanfaronna l’elfe dans le but d’énerver – avec succès – son adversaire… compte tes flèches l’humain, mais je suis certain que tu n’en auras pas assez pour moi !!

Malgré cela, Tal’var ne savait pas combien de temps il pourrait retenir les hommes qui les poursuivaient. D’après les bruits, d’autres venaient de les rejoindre, dont un en armure. Quelques mots en norse furent échangés, des mots houleux. L’elfe banda son arc. Deux flèches encochées.

Volgan déboula dans une grande salle à ciel ouvert. La pluie et la grêle tombait sur la partie centrale, dallée et décorée avec des symboles impies, ceux des quatre Puissances de la Ruine. Sa torche devenue inutile, il la laissa tombée où les flammes grésillèrent sous la pluie battue par le vent. Le froid revigora le norse. Les éclairs lui permirent de voir ce qui trônait sous les éléments. Une silhouette plus grande que lui, en armure noire ouvragée, demeurait immobile dans une gangue de glace. Autour de lui, en cercle, huit hommes en toge et portant les symboles du dieu au marteau levaient une main vers le prisonnier. Leur corps, leurs vêtements et armes s’étaient changés en cristal. Et derrière l’un de ces hommes, un autre homme en toge grise – bien vivant lui – psalmodiait à haute voix, les mains tenues de part et d’autre de la tête du prêtre cristallisé.
Volgan ne savait pas ce qui se passait, mais les sorciers ne lui disaient rien. L’aspect de vautour de ce sorcier accentuait ce sentiment. Il avança à pas feutré, couvert par le boucan des grêlons s’écrasant sur le sol et l’orage qui ne cessait d’enfler. Une ombre passa devant lui. Un éclair révéla un nain, torse nu, sa crête collée sur le côté de son visage.

- Où qu’tu vas toi ? gronda le nain en brandissant son arme, et qu’est-c’que tu fous ici ?

Bonsoir les amis

Je relis ce que j'ai écrit et je continue... à bientôt !

Haghar.